La vague de cherté que traverse le Maroc a révélé l’impuissance des organisations politiques, sociales et syndicales face à cette situation. Même après la création de ce qu’elles ont appelé le « Front social » pour lutter contre la hausse des prix, ces organisations sont restées prisonnières des conditions objectives qu’elles ont elles-mêmes engendrées et des luttes internes pour s’imposer dans la société. Cependant, aucune action concrète n’a émergé de ces initiatives pour permettre à ces organisations de revendiquer un quelconque succès.
Ce que les organisations n’ont pas réussi à accomplir, les réseaux sociaux l’ont fait, ne serait-ce qu’en mettant la question de la cherté au centre des débats. Ce sujet a retenu l’attention non seulement de la population affectée, mais également des responsables. À titre d’exemple, un simple TikToker a réussi à secouer l’inertie entourant la question des prix. Peu importe les motivations derrière cette mobilisation, le fait d’avoir relancé le débat représente un acquis populaire indéniable.
Les partis politiques, qui devraient être à l’avant-garde de la société – et qui l’ont été par le passé en incarnant la conscience éveillée du peuple – semblent aujourd’hui relégués au rang de simples instruments de promotion sociale. Ces partis, autrefois prêts à payer le prix fort pour défendre les droits de la société et qui ont obtenu des avancées considérables, se sont transformés en outils au service d’ambitions personnelles. Cela explique leur silence face à cette flambée des prix.
Ces formations politiques, déconnectées de leur mission originelle et devenues otages de leurs dirigeants, sont restées spectatrices de cette crise. Aucune d’entre elles n’a pris position face à l’augmentation alarmante des prix. Certaines semblent même patienter pour intégrer le gouvernement ou remplacer un parti susceptible de quitter la majorité. Elles n’ont réagi qu’après la décision royale d’annuler la célébration de l’Aïd al-Adha, publiant des communiqués de soutien sans réelle signification, oubliant que cette décision relève exclusivement du domaine religieux sous l’autorité du Commandeur des croyants, et non du champ politique.
Quant aux syndicats, historiquement en première ligne des luttes sociales contre la cherté de la vie, ils sont devenus aujourd’hui des entités fragmentées, se disputant des intérêts particuliers. La prolifération des syndicats en est la preuve, alors même que leur rôle fondamental est de défendre les revendications sociales. Une telle dispersion soulève des questions sur la véritable nature de leurs désaccords : sont-ils liés aux méthodes de gestion des affaires sociales, ou à des ambitions personnelles ?
Aujourd’hui, partis, syndicats et organisations civiles semblent réduits au rôle de spectateurs face aux dynamiques nées sur les réseaux sociaux. Ce sont ces plateformes numériques qui mènent désormais la bataille contre la cherté de la vie, tandis que les organisations traditionnelles se contentent de suivre et d’observer les choix qui en découleront.