L’économie algérienne traverse une période de stagnation et de dépendance, principalement en raison de sa forte dépendance vis-à-vis des hydrocarbures et de la mainmise de l’institution militaire sur les leviers de l’État. Depuis des décennies, le pétrole et le gaz représentent plus de 90 % des recettes d’exportation et environ 60 % des revenus de l’État, rendant ainsi l’économie algérienne extrêmement vulnérable aux fluctuations des prix de l’énergie sur les marchés mondiaux.
Si la situation paraît stable lors des périodes de prix élevés, comme ce fut le cas à certaines périodes au cours des deux dernières décennies, les crises financières révèlent rapidement la fragilité de ce modèle rentier dès que les prix chutent, à l’instar de la crise de 2014–2016.
Malgré des promesses répétées de diversification économique et de développement de secteurs tels que l’agriculture, l’industrie, le tourisme et la technologie, ces ambitions n’ont pas été concrétisées par des politiques efficaces sur le terrain. Ces secteurs restent sous-développés, manquent cruellement d’investissements et d’infrastructures. Beaucoup attribuent cette situation à la crainte des cercles décisionnels que la libéralisation économique n’affaiblisse la mainmise sécuritaire et militaire sur le pays.
Le climat des affaires n’est guère plus reluisant, miné par la corruption et le clientélisme. Des hommes d’affaires proches du pouvoir, tels qu’Ali Haddad, Issad Rebrab et d’autres, ont longtemps profité de privilèges et de marchés publics opaques, avant que certains ne soient évincés à la faveur du mouvement populaire. Beaucoup y voient davantage des règlements de comptes internes qu’une réelle volonté de réforme.
Cette crise affecte lourdement la jeunesse algérienne, confrontée à un manque cruel de perspectives d’emploi et de création de projets, malgré des milliers de diplômés universitaires chaque année. Cette situation pousse de nombreux jeunes à envisager l’exil, y compris parmi les plus qualifiés, dans un phénomène localement appelé « haraga », accentuant ainsi la fuite des cerveaux.
Sur le plan macroéconomique, l’Algérie subit une inflation galopante due à la dépréciation du dinar, à la faiblesse de la production locale et à des politiques économiques souvent improvisées. Le chômage, notamment chez les jeunes et les femmes, reste élevé, certaines estimations non officielles avançant des taux atteignant 30 % dans certaines régions.
Cette réalité est indissociable de la structure politique où l’armée n’est pas qu’une institution de défense, mais aussi un acteur économique majeur. Elle détient des entreprises, des usines et des parts entières de secteurs tels que le transport, les industries militaires et l’agriculture, et exerce un contrôle effectif sur les décisions économiques majeures. Cette emprise freine toute tentative de réforme susceptible de menacer ses intérêts.
Nombre d’observateurs s’accordent à dire que la poursuite de la gestion de l’économie avec une logique sécuritaire plutôt qu’économique perpétue l’immobilisme et rend toute réforme dépendante d’une séparation nette entre l’économie et la politique — et, plus encore, entre l’économie et la tutelle militaire. Sans cette séparation, l’Algérie restera prisonnière d’un cycle infernal de dépendance rentière et de sous-développement économique.