Les décisions prises par le ministre de l’Éducation nationale, Mohamed Saad Barada, suggèrent une certaine dynamique dans ce secteur, qui est devenu un véritable terrain d’expérimentation pour des programmes et des projets dont aucun n’a été mené à terme. Chaque nouveau responsable annule ou dissimule l’échec de son prédécesseur. Récemment, plusieurs directeurs ainsi que des chefs de services et de départements ont été suspendus après une inspection centrale portant sur le projet des « Écoles de l’Excellence », sous prétexte d’un retard dans la conclusion des marchés publics.
Il ne s’agit pas ici de s’immiscer dans le travail du ministère, mais il est légitime de l’interroger : est-ce vraiment à ces simples fonctionnaires de conclure les marchés publics, ou bien ces procédures dépendent-elles d’instances supérieures, parfois même des services centraux du ministère ? N’est-ce pas le ministre qui est le premier responsable de ces marchés ? Alors, pourquoi suspendre de simples gestionnaires après l’échec cuisant des Écoles de l’Excellence ? Nous ne cherchons pas à défendre ces fonctionnaires, car certains d’entre eux peuvent avoir failli à leurs devoirs, mais il est nécessaire de dire : « Ce n’est pas ainsi qu’on mène les chameaux, Saad ! »
Il est évident que le ministre est pleinement informé de ce qui se passe concernant les Écoles de l’Excellence. Leurs problèmes ne sont qu’une facette d’un problème global qui affecte tout le secteur de l’éducation, un secteur devenu une arène d’expérimentations improvisées. Tant qu’il n’existera pas une volonté sérieuse de résoudre les problèmes structurels de l’éducation, ces décisions ne seront qu’un écran de fumée destiné à masquer les véritables responsables.
Si le ministre veut vraiment comprendre l’ampleur du problème, il ne devrait pas se limiter à ces détails – même s’ils nécessitent bien sûr une enquête approfondie – mais se pencher également sur les nombreux marchés publics qui épuisent les finances du ministère sans offrir des services de qualité, comme les contrats de gardiennage ou de nettoyage. Il suffirait qu’il envoie ses inspecteurs visiter les toilettes des établissements scolaires pour constater que de nombreux élèves étudient dans des conditions insalubres en raison de ces contrats mal exécutés, qui mériteraient un audit sérieux en priorité.
Un exemple simple illustre cette situation : sait-il, Monsieur le Ministre, que les vidéoprojecteurs utilisés dans les classes des Écoles de l’Excellence nécessitent des pièces avec une durée de vie limitée qu’il faut remplacer régulièrement ? Or, ces remplacements ne sont souvent pas effectués à temps, voire totalement oubliés, privant ainsi les élèves des supports pédagogiques essentiels définis par le ministère.
Cet exemple n’est qu’une illustration parmi d’autres des dysfonctionnements de ces Écoles de l’Excellence, qui, loin d’atteindre leurs objectifs ambitieux, produisent en réalité des élèves dépourvus des connaissances de base nécessaires à leur apprentissage. Ces écoles considèrent même certaines connaissances fondamentales comme superflues, y compris des notions essentielles en grammaire, qu’on ne peut pourtant pas dissocier des mathématiques en termes d’importance.
Tout cela, Monsieur le Ministre, montre clairement qu’il n’existe pas de véritables garanties pour assurer la continuité du service public. De nombreuses classes des Écoles de l’Excellence cessent tout simplement de fonctionner, interrompant ainsi le service éducatif public. Si vous souhaitez vraiment identifier les racines du problème, il vous faut élargir l’enquête bien au-delà de ces fonctionnaires suspendus et vous pencher sur l’ensemble des marchés publics qui grèvent les finances du ministère sans offrir la qualité de service attendue.