Le secrétaire général du Parti de l’Istiqlal, Nizar Baraka, a profité d’un meeting organisé par son parti à l’occasion du 81e anniversaire de la présentation du Manifeste de l’indépendance, pour s’attaquer au duo comique Saïd et Wadie. Mais pourquoi cette attaque ? Qu’ont-ils fait ? Tout ce qu’ils ont fait, c’est présenter un sketch humoristique intitulé « Si Mohammed », peu après les propositions de révision du Code de la famille.
Ce sketch, semble-t-il, n’a pas plu au ministre de l’Équipement et de l’Eau. Lors du meeting, il n’a pas hésité à critiquer ce travail artistique, qu’il a qualifié de « mensonger ».
Cependant, Nizar Baraka, d’ordinaire calme, semble avoir oublié, dans son irritation, que Saïd et Wadie ne sont que des artistes, ni membres d’un parti, ni d’une organisation. Leur seul « tort » a été de refléter, avec une touche d’humour, l’avis de certains Marocains sur les propositions de réforme du Code de la famille.
Il est possible que le duo comique ait manqué de précision ou de nuance dans son traitement du sujet. Mais ils ne sont pas responsables du vide communicationnel qui a suivi la présentation des propositions de réforme. Ce sont des artistes, et leur travail reste une œuvre humoristique, qu’elle plaise ou non au secrétaire général et à ses collègues du gouvernement.
Au lieu de s’en prendre à un sketch comique et de le juger sur des critères de véracité ou de mensonge, Nizar Baraka aurait dû se pencher sur le vrai problème : le manque de communication de son gouvernement envers les citoyens marocains.
Cette fois-ci, le sujet n’est pas banal. Il concerne une question sensible qui touche tous les Marocains : les réformes du Code de la famille. Et ce manque de communication a laissé le champ libre à des campagnes de désinformation, notamment contre les droits des femmes.
Plutôt que de critiquer Saïd et Wadie, Nizar Baraka aurait mieux fait de pointer du doigt les défaillances de son gouvernement. Ce dernier a souvent brillé par son silence face à des questions majeures, donnant l’impression qu’il est absent ou déconnecté des préoccupations des citoyens.
Les Marocains, laissés à eux-mêmes, sont devenus une proie facile pour ceux qui instrumentalisent l’ignorance et les préjugés. Les détracteurs des propositions de réforme, notamment certains défenseurs de la polygamie, ont exploité le flou et les ambiguïtés entourant le sujet pour diffuser des fausses informations.
Le sketch « Si Mohammed », vu par plus de 9 millions de personnes sur Instagram, n’est qu’un reflet des malentendus qui subsistent. Il met en lumière les préoccupations et confusions d’une partie de la société marocaine.
Plutôt que de s’en prendre à des humoristes, Nizar Baraka aurait dû appeler son gouvernement à briser ce silence pesant et à clarifier sa position sur un sujet aussi crucial. Car laisser ce vide ne fait qu’alimenter les tensions et renforcer les résistances aux avancées en faveur des droits des femmes.