La Cour constitutionnelle nous rappelle, de temps à autre, ce qui se passe au sein du Parlement et la nature des élites qui s’occupent de légiférer pour notre pays. Cependant, les multiples juridictions du pays montrent clairement qu’une partie non négligeable des élus incarne véritablement les « élites corrompues ».
Parmi les dernières décisions prises par la Cour constitutionnelle, figure la destitution du député Mohamed Boudrika, membre du Rassemblement National des Indépendants (RNI), parti dirigeant le gouvernement et sa majorité.
Boudrika est actuellement en détention en Allemagne après avoir été arrêté par les autorités allemandes à l’aéroport de Hambourg en juillet dernier. Cette arrestation s’est faite sur la base d’une alerte émise par Europol, en réponse à un mandat lancé par les autorités espagnoles concernant des transactions financières suspectes impliquant l’homme d’affaires marocain sur leur territoire.
Le procureur général du Roi près la Cour d’appel de Casablanca a transmis le dossier judiciaire concernant les poursuites engagées contre Mohamed Boudrika, actuellement détenu en Allemagne, aux autorités judiciaires compétentes du ministère de la Justice, afin qu’il soit transmis à son homologue allemand. Cette démarche vise à demander son extradition, sachant que les deux pays sont liés par un accord de coopération judiciaire et d’échange d’informations juridiques signé en 2001.
Boudrika n’est que l’arbre qui cache la forêt, une forêt où la corruption s’étend sur une vaste superficie. Dans ce contexte, la corruption représente un véritable fléau, constituant une menace pour l’État en perturbant l’équilibre de l’institution législative.
Que signifie la présence d’un si grand nombre de parlementaires impliqués dans des affaires de corruption ? Que veut dire le fait qu’environ 10 % de cette institution se retrouvent derrière les barreaux ou soient poursuivis pour des affaires de corruption financière et administrative ? Comment ces individus ont-ils pu accéder à l’institution législative ?
Les partis politiques recherchent des chiffres à utiliser dans les négociations pour accéder au gouvernement ou conclure des alliances. Peu importe la manière d’obtenir ces sièges ou si les candidats sont réellement capables d’assumer leur rôle législatif et de contrôle. Ainsi, les organisations politiques tendent à inclure dans leurs listes des personnes disposant de moyens financiers, dans l’objectif d’obtenir un nombre significatif de sièges parlementaires, qui leur permettraient de négocier des portefeuilles ministériels. Les élections deviennent alors une simple course pour s’emparer des institutions gouvernementales et contrôler les nominations aux postes de responsabilité via le Conseil de gouvernement.
L’empressement à remplir les sièges, notamment avec des élites corrompues cherchant à redorer leur image à travers un poste parlementaire, transforme l’institution législative en un instrument au service des volontés du gouvernement. Des élites de ce type ne peuvent s’opposer à aucun projet gouvernemental, même si celui-ci est contraire aux intérêts de la majorité du peuple.
Certes, le Maroc connaît un développement remarquable à plusieurs niveaux, mais cela est dû avant tout à la monarchie, premier garant de la stabilité, ainsi qu’aux institutions profondes du pays. Cependant, la prolifération de la corruption à divers niveaux menace cet équilibre et met en péril l’essence même de l’État.