On pourrait écrire : « la Justice et la réputation des institutions », ou encore « la Justice contre la réputation des institutions ». Les deux expressions se suivent logiquement, car la justice incarne la réputation du pays ; porter atteinte à sa réputation revient à s’attaquer à celle de l’État. C’est pourquoi ce qui se passe aujourd’hui — cette forme de « tambourinage » contre l’institution judiciaire — n’est pas innocent. On observe l’émergence de chaînes douteuses sur Internet, dont l’activité principale semble être la dénigration de cette institution, en plus des informations faisant état de fuites de documents à la suite du piratage du site du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire.
L’affaire du piratage est désormais entre les mains de la Brigade nationale de la police judiciaire, sur ordre du procureur général près la Cour d’appel de Rabat. Par ailleurs, une réponse ferme a été apportée à l’encontre de certaines personnes soupçonnées de collusion avec des chaînes subversives basées à l’étranger.
Ces mesures représentent le strict minimum nécessaire à la protection de cette institution garante de l’application de la loi. Et soyons clairs : en défendant l’institution judiciaire, nous défendons l’institution elle-même, non les individus. De la même manière que nous critiquons Aziz Akhannouch, chef du gouvernement, tout en défendant l’institution qu’est la présidence du gouvernement, laquelle ne doit en aucun cas être mise en cause.
Notre défense du pouvoir judiciaire ne prend donc pas en considération les individus qui y travaillent, juges ou autres. À chaque époque, on trouve des personnes rigoureuses, d’autres moins. Les individus passent, changent de fonctions, mais l’institution demeure, immuable. Elle constitue l’un des piliers de l’État démocratique que le Maroc a choisi de manière irréversible.
La justice est le symbole fondamental d’un État démocratique, car elle incarne la véritable séparation des trois pouvoirs. L’indépendance du gouvernement — pouvoir exécutif — par rapport au Parlement — pouvoir législatif — reste relative, en raison de la difficulté à séparer la majorité gouvernementale de celle parlementaire. Ainsi, la justice demeure la principale institution incarnant cette séparation des pouvoirs, et son indépendance est le signe manifeste d’un État démocratique. Le Maroc a d’ailleurs fait du choix démocratique l’un des fondements de sa Constitution actuelle.
C’est pourquoi nous considérons que les attaques ciblant l’institution judiciaire ne visent pas uniquement certains individus — dont certains jouissent d’une réputation irréprochable, et d’autres se sont volontairement exposés à la critique —, mais relèvent d’une stratégie plus large : saper la réputation de la justice et la fragiliser afin de la rendre manipulable au gré des intérêts de certains cercles de « chantage international ».
L’enquête sur les prétendues fuites de documents, tout comme celle sur la collusion avec ces chaînes manipulatrices, ne doit pas s’arrêter à mi-chemin. Elle doit, impérativement et dans un souci d’intérêt national, aboutir à l’identification de la ou des parties exploitant les consciences faibles et les intentions malveillantes pour porter atteinte à une institution essentielle de l’État.
Nous réaffirmons que l’institution est pérenne, tandis que les individus ne sont que de passage. Il peut y avoir des juges respectueux du droit, d’autres moins scrupuleux. Mais cela ne signifie en aucun cas que l’institution judiciaire, en tant que telle, est corrompue.
La réputation de la justice est indissociable de celle du pays. Saper cette réputation revient à attaquer le choix démocratique du Maroc, car, comme nous l’avons dit, le pouvoir judiciaire est le symbole par excellence de la séparation des pouvoirs