Le marché des viandes rouges au Maroc peine toujours à retrouver son équilibre. Malgré les efforts du gouvernement, dont la suppression des droits de douane sur les importations de bétail et de viandes fraîches, ainsi que les subventions aux aliments pour bétail, les prix restent élevés, oscillant entre 90 et 100 dirhams le kilo.
Des intermédiaires qui contrôlent le marché
L’une des principales causes de cette inflation réside dans le rôle des intermédiaires, appelés localement « Chennaka ». Ces négociants achètent le bétail directement auprès des éleveurs à des prix souvent inférieurs à leur valeur réelle, avant de le revendre avec une marge importante. Ce système entraîne une hausse artificielle des prix, rendant la viande de plus en plus inabordable pour les consommateurs.
Dans les souks hebdomadaires, où la majorité des transactions de bétail ont lieu, les prix sont fixés de manière opaque, sans réelle régulation. Les bouchers qui s’approvisionnent directement auprès des éleveurs peuvent proposer des prix plus compétitifs, mais ce modèle reste minoritaire face à la domination des intermédiaires.
Une filière désorganisée et peu rentable pour les éleveurs
Les éleveurs, notamment les petits et moyens producteurs, sont les plus pénalisés. Face à l’inflation des coûts de production (aliments, soins vétérinaires, etc.), ils peinent à rentabiliser leur activité. Beaucoup doivent vendre une partie de leur cheptel pour maintenir leur exploitation, réduisant ainsi l’offre de viande sur le marché et alimentant encore plus la hausse des prix.
Le Conseil de la Concurrence et plusieurs experts dénoncent cette situation, pointant du doigt une commercialisation anarchique et un manque de transparence dans la fixation des prix. Une modernisation des circuits de vente, inspirée du modèle d’agrégation du Plan Maroc Vert, pourrait être une solution viable pour stabiliser le marché.
Les importations inefficaces et des spéculateurs en embuscade
Pour tenter de réguler les prix, le gouvernement a encouragé l’importation de viandes et de bétail en supprimant les taxes douanières. Cependant, cette mesure n’a pas eu l’impact escompté. Les prix restent élevés et les bénéfices de ces importations semblent être accaparés par un groupe restreint d’acteurs du marché.
Le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, a évoqué publiquement l’existence de 18 grands spéculateurs qui influencent les prix du marché des viandes rouges. Pourtant, aucune enquête officielle n’a été lancée pour identifier ces acteurs et comprendre l’étendue de leur impact sur le marché.
Des perspectives incertaines
Malgré les récentes précipitations, qui ont amélioré les conditions d’élevage, l’avenir du secteur reste incertain. Le gouvernement mise sur le repeuplement du cheptel et sur la modernisation des abattoirs pour assurer un meilleur approvisionnement du marché. Toutefois, sans une véritable réforme des circuits de commercialisation et un contrôle strict des pratiques spéculatives, il est peu probable que les prix des viandes rouges baissent à court terme.
En attendant, consommateurs et éleveurs continuent de subir les conséquences d’un marché déséquilibré, où la spéculation l’emporte sur les mesures de soutien mises en place par l’État.