À l’approche du 1er mai, jour de célébration de la classe ouvrière à travers le monde, le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a présidé la première session du dialogue social, devenu un simple exutoire pour rejouer une symphonie bien connue : celle d’un apaisement social de façade, là où il faudrait des solutions profondes et des visions claires, et non des mesures temporaires et superficielles.
Pourquoi le gouvernement choisit-il cette période précédant la fête du 1er mai pour ouvrir le dialogue social ? N’aurait-il pas été plus judicieux de le faire dès la rentrée sociale, moment reconnu dans le monde entier comme le véritable point de départ du dialogue entre les partenaires sociaux, soit au mois de septembre, lors du retour des citoyens de leurs vacances d’été ?
Quel sens peut bien avoir un dialogue social dans un climat de tension manifeste entre le gouvernement et les syndicats ? Cela ne signifie en aucun cas que nous prenons parti pour l’un ou l’autre camp. Il ne s’agit ni de défendre les syndicats contre le gouvernement, ni l’inverse, ni encore de soutenir le patronat au détriment des travailleurs. Ce qui importe, c’est l’équilibre et la complémentarité nécessaires à une bonne direction du pays.
Cet équilibre ne peut être atteint sans une volonté sincère du gouvernement de proposer une vision claire qui valorise la production, sans que cela se fasse au détriment de qui que ce soit. Car si la production devient un prétexte pour léser les droits des travailleurs, ce n’est plus de la productivité, mais de l’exploitation. C’est pourquoi la déclaration de la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM), après la première session du dialogue, laisse perplexe : « Nous aspirons à un Code du travail équilibré, permettant aux entreprises de créer plus d’emplois et d’améliorer la productivité, notamment dans un contexte de compétitivité internationale. »
Personne ne conteste l’importance de la paix sociale pour favoriser la productivité et attirer les investissements étrangers, ceux-ci fuyant naturellement toute forme d’instabilité. Mais cela ne doit jamais se faire aux dépens des travailleurs, que certains voudraient parfois réduire à l’état d’esclaves. L’investissement, au contraire, devrait être une opportunité pour améliorer les revenus des citoyens, en particulier les jeunes.
Le gouvernement – et ceux qui défendent les intérêts des grands groupes – semblent croire à tort que les Marocains aiment faire grève. C’est faux. Les Marocains voient la grève comme un dernier recours, une solution extrême après avoir tenté toutes les voies pacifiques pour faire valoir leurs droits. Bien souvent, ils renoncent à certains de leurs droits juste pour préserver la normalité de la vie quotidienne. Ceux qui pensent le contraire voient les Marocains comme de simples subalternes.
Soyons justes : certains syndicats exploitent parfois les travailleurs pour servir des agendas qui n’ont rien à voir avec leurs droits. Mais ces cas ne doivent pas être généralisés. Le gouvernement doit donc instaurer un véritable dialogue social, et non se contenter de réunions ponctuées de sourires, de poignées de main et de photos à usage médiatique, qui ne nourrissent personne.