L’un des principaux éléments manquants dans le rapport publié par le Conseil Supérieur de l’Éducation, de la Formation et de la Recherche Scientifique sur « La nouvelle école… Un nouveau contrat social » est l’absence d’une définition claire du concept de « nouvelle école ». Après la lecture du rapport, il apparaît que le modèle proposé par le Conseil correspond à une école existant ailleurs, avec des institutions différentes, un cadre juridique distinct et une gestion spécifique. Or, le concept de « nouvelle école » devrait émaner de notre propre environnement et société.
L’absence d’une définition précise a rendu les propositions du Conseil floues, difficilement applicables, et peut-être simplement une manière d’éviter d’affronter un problème de fond.
Le Conseil a mis l’accent sur ce qu’il appelle la gouvernance des établissements scolaires, en s’appuyant sur quatre piliers :
L’instauration de l’autonomie des établissements scolaires comme un facteur essentiel pour la mise en place d’institutions éducatives responsables ;
L’adoption d’un système indépendant d’évaluation périodique ;
La diversification, qui permettrait de créer les conditions nécessaires en respectant les spécificités locales et environnementales ;
L’ouverture institutionnelle.
Le Conseil a estimé que les collectivités territoriales, en raison de leur proximité avec les citoyens, sont aujourd’hui appelées à contribuer à la réalisation des objectifs de la « nouvelle école » et à la gestion du service public de l’éducation et de la formation. Il a souligné que l’élargissement du champ de responsabilité de ces institutions élues en matière d’éducation constitue « un facteur clé dans la construction de la nouvelle école ».
Un transfert de compétences à haut risque
Le transfert des compétences du ministère de tutelle – à travers ses institutions centrales et déconcentrées – vers les collectivités territoriales nécessite plus de clarifications. Il s’agit d’une aventure aux conséquences imprévisibles.
Dans un premier temps, le Conseil a proposé que ces collectivités se chargent de l’entretien, de la sécurité et de la propreté des établissements scolaires, ainsi que des activités annexes à la scolarisation, comme le transport scolaire, l’hébergement, la restauration scolaire et le logement des enseignants dans les zones rurales reculées. Toutefois, cette phase de transition ne serait que temporaire, avant un passage rapide vers l’autonomie des institutions éducatives, qui est l’enjeu central du projet.
Dans la deuxième phase, les collectivités territoriales seraient impliquées dans la définition des projets éducatifs à travers une approche de co-construction et leur mise en œuvre dans le cadre de partenariats autour d’un projet éducatif local.
Après avoir présenté les bases du projet, nous nous concentrons ici sur l’autonomie des établissements scolaires à travers le rôle des collectivités locales.
Des interrogations légitimes
Il est essentiel de se poser les questions suivantes :
Quelle est la nature de l’acteur ou de l’organe auquel le Conseil Supérieur de l’Éducation et de la Formation propose de transférer ces compétences ?
Quelles sont ses références culturelles et en matière de gestion ?
Quel est le niveau d’instruction et de qualification scientifique des élus chargés de gérer ces collectivités ?
Le projet peut sembler séduisant sur le papier, mais peut-on réellement compter sur des conseils municipaux qui, dans la grande majorité des cas, ont fait preuve d’échec cuisant ? Une grande partie des sièges est occupée par des personnes n’ayant pas atteint un niveau d’instruction adéquat, d’autant plus que la loi n’impose aucune exigence en matière d’éducation pour intégrer ces conseils.
Par ailleurs, les récents scandales de corruption, les nombreuses arrestations et enquêtes impliquant des présidents de collectivités locales soulèvent de sérieuses inquiétudes. Le transfert de ces compétences pourrait alors se révéler une simple manœuvre pour précipiter la disparition définitive de l’école publique.