Le communiqué du Cabinet Royal, publié à l’issue du Conseil des ministres présidé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, a délivré un message clair au sujet de « l’hémorragie » subie par le cheptel national. Mais dans le langage des États, rien n’est jamais trop tard. À travers les directives royales, le Conseil des ministres a ainsi tracé la voie vers une reconstruction et une reconstitution du cheptel national.
Après avoir évoqué l’interpellation par Sa Majesté du ministre de l’Agriculture sur l’état du cheptel et la réponse de ce dernier, le communiqué précise que « Sa Majesté, que Dieu le préserve, a donné Ses hautes instructions pour que l’opération de reconstitution du cheptel soit menée avec succès à tous les niveaux, de manière professionnelle, selon des critères objectifs, et que la gestion des aides soit encadrée par des commissions supervisées par les autorités locales ».
La réponse du ministre apparaît comme une suite de phrases creuses, dénuées de preuves concrètes. Elle s’est concentrée sur les précipitations, leur rôle dans la production céréalière, leur effet sur les cultures d’automne et de printemps, ainsi que sur les arbres fruitiers. Elles auraient également eu un impact positif sur le couvert végétal et le bétail à travers les différentes régions du Royaume.
La question à la fois comique et tragique est la suivante : quel est le rapport entre les précipitations et les responsabilités incontournables du gouvernement, qui ont conduit à l’hémorragie du cheptel ?
Le communiqué royal parle de reconstitution du cheptel national, et non de valorisation de celui-ci. En d’autres termes, si le gouvernement avait rempli sa mission, Sa Majesté aurait ordonné de consolider les résultats positifs et de bâtir dessus. Or, malheureusement, le ministre a dissimulé derrière ses formules vagues un aveu précédent : environ 40 % du cheptel national a été perdu en moins de dix ans.
Cette interpellation et le retrait de la supervision de l’opération de reconstitution signifient l’échec du ministère qui pilotait le plus grand projet agricole de l’histoire du Maroc : le Plan Maroc Vert. Ce plan a englouti des milliards de dirhams, entraînant une flambée des prix des produits agricoles de base, la disparition de l’agriculture vivrière, l’échec de l’agriculture d’exportation, et enfin, la destruction du cheptel national – sans que l’importation n’ait pu apporter de solution efficace, bien au contraire, elle a aussi vidé les caisses de l’État sans résoudre la crise du prix des viandes.
L’institution royale, en tant que capitaine du navire marocain, a pris à bras-le-corps ce défi. C’est pourquoi Sa Majesté a ordonné la reconstitution du cheptel selon une approche progressive.
Cette interpellation critique intervient peu de temps après la décision royale, en Sa qualité de Commandeur des Croyants, relative au sacrifice de l’Aïd, dans laquelle Sa Majesté a exhorté les citoyens à se limiter aux traditions de l’Aïd sans procéder au sacrifice, compte tenu de l’état critique du cheptel.
Ce fut une initiative audacieuse de la part de l’institution de l’Imarat Al Mouminine, garante de la fatwa et des affaires religieuses, qui a ainsi levé l’obligation sur les citoyens. Aujourd’hui, cette décision est prolongée par un appel ferme et effectif à la reconstitution du cheptel à tous les niveaux, de manière professionnelle, avec transfert de la responsabilité de ce chantier des mains d’un ministère en échec vers les autorités locales.