Au lieu d’un gouvernement du « Mondial 2030 », nous avons besoin d’un gouvernement de la « paix sociale 2030 ».
Avril est considéré comme la période précédant le 1er mai, fête de la classe ouvrière, où ont lieu le dialogue social, l’étude et la discussion des questions relatives à la classe ouvrière et aux fonctionnaires, ainsi que les négociations autour des revendications légitimes – ou jugées telles par les centrales syndicales.
Cette année, le dialogue social se déroule sous la « menace et la contrainte ». En effet, cette année marque le début d’un parcours très différent, car elle voit l’entrée en vigueur de la loi organique sur le droit de grève, qui a suscité une large controverse et que les syndicats considèrent comme une atteinte à la liberté syndicale, la rendant inopérante. Par conséquent, il n’est plus question d’un dialogue social basé sur le compromis ou l’échange de points de vue, les syndicats n’ayant d’autre choix que d’accepter ce que le gouvernement propose.
Pourquoi le dialogue social est-il aujourd’hui considéré comme formel ?
Parce que les syndicats n’ont plus aucun levier pour se défendre. Si les propositions du gouvernement, qui tombent comme une révélation divine et sont irrévocables, ne les convainquent pas, ils n’ont aucun recours ni moyen d’imposer leur vision. La loi organique sur la grève pèse sur eux comme une épée de Damoclès, ne leur laissant d’autre choix que de se soumettre.
Le dialogue social, une fois des lois organiques imposées de manière unilatérale, perd tout sens. Le problème ne réside pas tant dans la loi elle-même que dans la manière dont elle est imposée « d’en haut », par la force de la majorité numérique – ce qui constitue un véritable problème.
Que se passerait-il si le gouvernement adoptait une autre approche ? Et s’il commençait à penser à une « paix sociale 2030 » plutôt qu’à un gouvernement du « Mondial 2030 » ?
La paix sociale ne peut être instaurée par l’autoritarisme exercé par le gouvernement, et cet excès de pouvoir ne peut que mener au chaos social.
Puisque Aziz Akhannouch, chef du gouvernement, connaît bien Driss Basri, ancien ministre d’État à l’Intérieur, rappelons-lui que ce dernier a supervisé la signature d’un accord de paix sociale entre le gouvernement et les centrales syndicales en 1996, à la suite du discours du roi Hassan II évoquant le « malaise cardiaque » qui menaçait le Maroc. À cette époque, le gouvernement et les syndicats avaient compris que la réalité ne permettait plus les confrontations, ce qui a conduit à la signature d’un accord de paix sociale. Cela a constitué le prélude naturel au gouvernement d’alternance consensuelle dirigé par Abderrahmane Youssoufi.
Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin de paix sociale, compte tenu des transformations que connaît l’économie marocaine – des transformations inquiétantes. Il est louable de penser au Mondial 2030, mais il faut le faire à travers un gouvernement de la paix sociale 2030, car on ne peut accueillir un tel événement dans un climat qui ouvre la voie au chaos.
La paix, comme nous le savons, a un coût politique et économique. En contrepartie d’un apaisement sur le front social, certaines mesures doivent être prises. Il est donc essentiel que le gouvernement s’engage à :
arrêter les hausses de prix et plafonner les prix des carburants, qui entraînent toutes les autres augmentations ;
continuer à subventionner certains produits ;
se concentrer sur l’emploi et la production de richesse pour dynamiser la chaîne du marché.
En échange, les syndicats suspendraient les grèves jusqu’en 2030, une période qui pourrait profiter au pays et garantir la continuité de la paix sociale.