Par Kbir Belkrim
Sa Majesté le Roi, en sa qualité de Commandeur des croyants, a, dans un esprit de bienveillance et de souci de l’intérêt général, appelé l’ensemble des Marocains à renoncer à la tradition du sacrifice de l’Aïd Al-Adha cette année, en raison des défis climatiques et économiques qui ont entraîné une diminution du cheptel et une flambée des prix, impactant particulièrement les catégories à revenu limité.
Les Marocains ont accueilli cette décision sage avec joie et satisfaction. En guise de compensation, nombre d’entre eux se sont tournés vers l’achat de viande et d’abats pour remplacer la pratique du sacrifice.
Jusqu’ici, tout semblait normal. Mais ce qui ne l’est pas, c’est l’émergence de la mafia de la viande, qui s’est ruée à la vitesse de l’éclair vers les abattoirs européens, important d’énormes quantités de viande congelée dans une quête effrénée de gains rapides et d’économies. Les spéculateurs et profiteurs de crises et de circonstances s’y sont engouffrés pour ponctionner les poches des Marocains.
À l’approche de l’Aïd, une avidité sans borne est apparue, alimentée par des bouchers attirés par les prix bas des béliers sur le marché. Ils ont abattu massivement les animaux, inondant le marché de carcasses, et les prix n’ont cessé de grimper jusqu’à atteindre des sommets vertigineux.
La mafia de la viande rouge congelée importée a envahi presque tous les marchés des villes et des campagnes. Pire encore, la rapacité des mafias de crise a trouvé un substitut aux viandes bovines et ovines : elles ont commencé à abattre des ânes et des mulets, séparant les os de la chair pour les redistribuer à certains vendeurs de viande, fabricants de merguez et de viande hachée, dans une quête d’enrichissement illégal exploitant la réaction des Marocains à la décision royale.
Ni ces bouchers, ni ces importateurs n’ont pris en considération la situation du cheptel national, ni la santé des citoyens. Chacun a couru après des profits inattendus générés par des revenus exceptionnels, suite à l’achat par les Marocains de quantités de viande pour compenser et maintenir, ne serait-ce qu’un seul jour, une partie du rituel du barbecue, pour combler un simple manque psychologique.
Nul ne saurait nier l’émergence d’intermédiaires d’un genre particulier et de mafias spécialisées dans les crises, qui recourent à des sources illégales pour s’approvisionner en viandes, qu’il s’agisse de viandes d’âne, de mulet ou autres. L’important pour eux est de satisfaire la demande et de poursuivre une richesse illicite et perdue.
À cela s’ajoute l’apparition de « spécialistes » qui, dans la douleur et la crise, voire dans des situations exceptionnelles, sont parfois des politiciens qui vont à l’étranger pour importer ce qui est demandé, comme cela s’est produit durant l’Aïd Al-Adha actuel, où certains ont eu recours aux abattoirs des chrétiens et autres pour ramener des abats et des viandes bovines congelées. D’autres encore ont importé de la viande d’animaux, dont des ânes et des mulets, que les Marocains n’avaient jamais consommée en connaissance de cause, et qui ont été proposées sur le marché de façon illégale et frauduleuse afin d’être vendues aux Marocains.